Des civils et des policiers ont perdu la vie, mercredi, dans la capitale sierra léonaise, à la suite de violentes manifestations contre la vie chère.Le gouvernement sierra léonais a imposé un couvre-feu national, de quinze heures à sept heures du matin, après les émeutes qui ont endeuillé hier le pays. Au moins deux policiers ont été « frappés à mort par les manifestants » dans l’est de la capitale, selon Brima Kamara, porte-parole de la police. Le nombre de manifestants tués n’est pas encore précisé. A l’inverse, ils comptent plusieurs blessés et arrestations dans leurs rangs.
Au motif de l’augmentation du coût de la vie, de la corruption et des brutalités policières, des manifestants ont bloqué la principale artère menant à l’aéroport international de Lungi, à Freetown, avant de se heurter aux forces de sécurité. Face aux tirs de gaz lacrymogènes, ils ripostent par des projectiles. Des personnes auraient été tuées après que la police a ouvert le feu, selon des témoignages.
Plusieurs enseignes, telles que banques et magasins, sont restées fermées toute la journée alors qu’un « black-out internet quasi-total » a eu lieu pendant environ deux heures, selon l’observatoire des perturbations de l’internet Netblocks.
Par ailleurs, les émeutes ont concerné plusieurs autres villes, telles que Makeni et Magburuka, situées au centre du pays, affirment certains médias.
A l’initiative d’un groupe de femmes commerçantes, les manifestations devaient être un « rassemblement pacifique ». Dans une lettre adressée à l’inspecteur général de la police, les initiatrices disaient vouloir « attirer l’attention sur les difficultés économiques et les nombreux problèmes qui affectent les femmes de la Sierra Leone ». Toutefois, le coordonnateur de la sécurité nationale a déclaré, samedi, n’avoir reçu aucune demande d’autorisation de manifester d’une quelconque organisation.
Dans la soirée, le président Julius Maada Bio a appelé ses concitoyens au calme. Il a lancé le mois dernier de nouvelles pièces de monnaie et billets de banque pour rétablir la confiance dans un contexte d’importante inflation. Mais certains Sierra Léonais réclament toujours sa démission. « Nous avons la responsabilité de protéger chaque citoyen de la Sierra Leone. Ce qui s’est passé aujourd’hui est malheureux et fera l’objet d’une enquête approfondie. J’exhorte tous les Sierra-Léonais à rester calmes », a-t-il déclaré sur Twitter.
Sur le même canal, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a « fermement condamné les violences ayant conduit à des pertes en vie humaine » dans ce pays de la région. Elle appelle ainsi au « respect de la loi et à l’identification de leurs auteurs pour qu’ils soient présentés devant la justice ».
Malgré la richesse de son sous-sol et ses 7,5 millions d’habitants, la Sierra Leone est classée parmi les pays les plus pauvres de la planète. Longtemps minée par une guerre civile (1991 – 2002), cette ancienne colonie britannique se remettait difficilement de l’épidémie d’Ebola (2014-2016) quand elle a été frappée de plein fouet par la pandémie de Covid-19.
Aujourd’hui, comme plusieurs pays ouest-africains, la Sierra Leone subit les contrecoups de la guerre russo-ukrainienne, au plan alimentaire surtout, ce qui rend le quotidien de ses habitants encore plus difficile.