En l’espace de trois jours dans cette région située à la frontière avec le Mali, une quinzaine de personnes ont été tuées dans des attaques attribuées aux jihadistes.Après des mois d’accalmie, les attaques attribuées aux groupes terroristes reviennent avec intensité à Tillabéri, à l’ouest du Niger. Déjà, samedi 22 octobre, onze camionneurs qui livraient des vivres et du ciment ont été interceptés sur une route sablonneuse et déserte entre la ville de Banibangou et la localité de Tizigorou, près de la frontière avec le Mali, avant d’être massacrés par « des hommes armés », de présumés jihadistes, selon un responsable municipal de Banibangou, la commune où les attaques ont eu lieu.
Alors que les habitants n’avaient pas fini de faire leur deuil, des hommes armés ont ciblé le lendemain, vers six heures du matin, une position de la gendarmerie du département de Kollo, à Tillabéri. Deux gendarmes y ont perdu la vie. C’est dans les mêmes circonstances que trois policiers ont été tués, lundi 24 octobre, après l’assaut du poste de police de Tamou, dans la même région, par des « individus armés non identifiés ». Mardi 25 octobre, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Gsim), filiale d’Al Qaida au Maghreb islamique (AQMI) au Sahel a revendiqué cette attaque, affirmant avoir tué « cinq apostats agents de la France ».
La récurrence de ces attaques jihadistes présumées a semble-t-il créé un effet de surprise chez les populations de Tillabéri. Elles avaient commencé à s’habituer à l’accalmie qui s’est installée depuis plusieurs mois dans leur région. Mais entre samedi et lundi, onze civils et cinq membres des forces de l’ordre ont été tués, obligeant les autorités locales à revoir leurs stratégies de défense et de sécurisation dans cette immense et instable région de 100.000 km2.
Les motos de la terreur
Après l’attaque de la gendarmerie de Kollo, le préfet du département, Ibrahim Kiamogo, a pris un arrêté interdisant « formellement » la circulation de motos « de jour et de nuit dans la commune rurale de Namaro à compter du mercredi 26 octobre 2022 ». Ces moyens de transport sont principalement utilisés par les groupes jihadistes dans leur guerre asymétrique avec les Etats du Sahel.
La région de Tillabéri se situe dans la zone dite « des trois frontières », aux confins du Burkina Faso et du Mali, d’autres pays sahéliens confrontés aux violences djihadistes. Depuis 2017, elle est le théâtre d’actions sanglantes d’insurgés liés à Al-Qaïda ou au groupe Etat islamique (EI), dont la branche sahélienne avait tué en 2017 trois bérets verts de l’armée américaine. Après cette embuscade meurtrière à Tongo-Tongo, près de la frontière avec le Mali, le groupe jihadiste est monté en grade dans l’architecture des succursales de l’Etat islamique.
Avant le court répit de 2022, des jihadistes présumés y avaient multiplié aussi en 2021 des assauts particulièrement sanglants contre des civils dans leurs villages et dans leurs champs.
En réponse, les autorités nigériennes ont lancé de vastes opérations à proximité de la frontière avec le Mali, avec l’appui récent, dans le cadre d’un « partenariat de combat », de 250 soldats français. Après son retrait du Mali en effet, la force Barkhane s’est repositionnée dans cette même zone frontalière pour poursuivre sa lutte contre les groupes jihadistes.